samedi 11 juin 2011

FILMS DE BRICE DELLSPERGER

FILMS DE BRICE DELLSPERGER
« Body Double »
Depuis 1995, Brice Dellsperger réalise des films regroupés sous le titre de Body Double, numérotés selon l'enchaînement de
leur réalisation. Pouvant durer de quelques minutes à 1h45, ils ont tous pour principe de réinterpréter des scènes de films
célèbres, à commencer par Brian de Palma (à qui l'artiste a emprunté le titre générique), en passant par Kubrick, Gus Van Sant,
Zulawski ou David Lynch. Toutes les séquences sont choisies en fonction des tensions qu'elles révèlent : agressions, meurtres,
voyeurisme, filatures, sexe, amour, inceste ... Les acteurs sont non professionnels. Tous sont travestis et véritablement
«portés » par leurs rôles grâce à des jeux délibérément outranciers dont l'objectif est de perturber les codes du cinéma. Audelà
de la référence au cinéma réflexif de De Palma, Body Double signifie à la fois doublure et corps dédoublé, transgenre,
ambiguité sexuelle, double identité et personnalité mouvante. Du coup, les films de Dellsperger se présentent comme des
échappées hallucinatoires, chaotiques et délirantes à la fois. La dimension de la performance est évidente, tant le corps,
l'action et la parole sont étroitement liés. L'artiste considère d'ailleurs ses oeuvres comme des performances dont il construit
la mise en scène avec la plus grande attention possible.

Tu préfères être un monstre visible ? Moi, j’ai tout dehors. Par rapport aux gens en costume cravate, jupe-culotte, machin, qui étaient vraiment des monstres. Quand j’ai découvert les punks, je me suis dit ces gens-là sont beaux, ce sont des fleurs bizarres dans la rue. Ils font peur parce qu’ils sont tellement beaux. Je pense que c’est par là qu’il faut aller pour inventer sa vie et surtout ne pas refaire ce schéma pourri de gens avides de réussite, ces gens d’une droite dure, prêts à tout pour se tailler un chemin à coups de serpe dans la société et qui finalement ont tous échoué lamentablement. Ma mère a une vieillesse atroce – pas assez à mon avis – genre, avec des aides sociales. Elle est aigrie, obèse, malheureuse, cimentée dans sa haine et son dépit, parfaite. J’ai mis du temps à avoir du plaisir. Mais quel plaisir de voir ces gens se casser la gueule dans l’humiliation ! Parce que si c’était secret ça serait encore trop beau. Non, ce qui est bien c’est que ça se voit.



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Moi je suis pédé, je suis pas gay. Quand tu es gay tu es mince, tu as l’air jeune, tu as les carrés de chocolat, le muscle, le pouvoir d’achat, la bonne marque, la bonne coupe, les bonnes chaussures. C’est juste « non », impossible. Et le SNEG – le Syndicat national des entreprises gaies – est une entreprise de démolition de la sexualité. Pourquoi ? Parce qu’avant il y avait les jardins publics, les pissotières et, en dernier recours, la rue. Maintenant quand tu veux baiser, tu vas dans des baisoirs, tu payes, tu consommes tout. Les mecs ils consomment gay. Ils s’habillent gay, ils parlent gay et ils vivent gay entre eux. Ils veulent juste faire comme les hétéros en moins bien, en moins efficace, et ils copient exactement une population qui les a ostracisés jusqu’à ce qu’ils deviennent légaux en 1980. Genre c’est non, c’est impossible, et quand une grande folasse comme moi, bien traditionnelle, traverse en plein jour la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie, le cœur du cœur du Marais de Paris, et que j’ai le cuir, le cockring avec genre le paquet comme ça, genre « vous avez vu Messieurs, j’ai amené la viande » et que j’ai des faux cils, les mecs disjonctent. Parce qu’il font « cuir, humm… paquet… hummm » et puis « faux cils ? Noooon !!!! » Ils ont oublié qu’ils ont inventé le cross-­dressing. Aujourd’hui les gays dans la rue ont l’air de métrosexuels.



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C’était quoi l’idée des Body Double ?Pour le 22, c’est de refaire Eyes Wide Shut, une version un peu kaléidoscopée, pas dans la linéarité. Je suis tous les acteurs et les actrices, en travesti. Et les mouvements de caméra, le jeu, tout est copié sur l’original. Sauf que c’est moi qui suis à l’image et que ce n’est qu’une seule personne diffractée en plusieurs qui fait d’un dialogue un monologue. Donc la vision analytique du film est complètement chamboulée. Visuellement c’est encore plus zarbi parce qu’il y a pas mal de technologie, donc même quand on refait L’Important c’est d’aimer [ndlr : dans Body Double X], on change beaucoup de choses par rapport au Zulawski. Ça me permet de développer mon jeu même si ce n’est pas vraiment un jeu d’acteur mais plus de mime, puisque je suis en lip sync. Et ça me permet aussi de jouer à la poupée avec moi-même, puisque je me fais mes propres coiffures, mes maquillages. Je suis plus qu’un acteur et je suis moins qu’un auteur.

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